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27 octobre 2010 3 27 /10 /octobre /2010 09:30

La-chambre-de-Jacob---Virginia-Woolf.jpg

 

Quatrième de couverture 

Capter l'insaisissable, le flux du temps, telle est la préoccupation majeure de Virginia Woolf à travers son œuvre. Dans ce troisième roman, publié en 1922, elle entend faire le portrait de Jacob, jeune britannique de petite noblesse, mort très jeune au champ de bataille de la Première Guerre mondiale. Plutôt que de tenter de trouver la voix de Jacob, l'écrivain s'approche de ceux qui l'ont connu de près ou de loin, persuadée que c'est en accordant leurs visions qu'elle effleurera la complexité de ce personnage. La mère, devenue veuve très tôt, les femmes aimées, trahies, les camarades de Cambridge, qui se livrent en même temps qu'ils l'évoquent. Leurs voix se heurtent, s'interrompent, s'unissent parfois, à l'image du choc brutal que représentent la rencontre entre les êtres et leurs tentatives pour se comprendre. La grande force de ce récit réside dans la justesse avec laquelle Virginia Woolf rend compte des sentiments, de leur inconstance, et du flot capricieux de la mémoire. Replaçant l'intimité de chacun dans un cadre plus large, naturel ou urbain, elle donne ainsi à entendre la musique des âmes, sur fond de vacarme du monde.

Avis d'une lectrice du dimanche

C'est un livre difficile, qui se mérite !

Je me suis perdue à maintes reprises pendant cette lecture. Je revenais en arrière pour essayer de saisir ce qui m'avait échappé. J'ai même consulté sur internet des biographies de Virginia Woolf pour mieux comprendre.

Pourquoi n'ai-je pas abandonné ?
Parce que cet auteur m'a  intriguée.
Parce qu'il est difficile d'abandonner cette belle écriture, poétique et recherchée.
Parce que j'ai finalement bien apprécié ces tableaux, ces instants de vie dont il faut scruter le détail pour discerner les contours.

C’est roman vraiment étrange et mélancolique.
Les descriptions sont nombreuses et très belles :

« Les îles Scilly bleuissaient ; une soudaine fièvre de bleu, de violet, de vert, saisit la mer : la laissa blême ; infligea une zébrure, vite disparue ; mais le temps pour Jacob de passer sa chemise par-dessus sa tête, toute l’étendue des vagues était bleue et blanche, ondoyante et crêpelée, bien que de temps en temps meurtrie d’une large marque violette, comme une ecchymose ; ou ornée d’une grosse émeraude teintée de jaune. »

 

Le personnage central est Jacob Flanders. Il n’est pas décrit de manière précise mais seulement esquissé grâce à quelques scènes très brèves depuis son enfance jusqu’à l’âge adulte. Tous ceux qui croisent son chemin livrent leurs impressions sur le jeune homme. Jacob Flanders ne passe pas inaperçu et ne laisser personne indifférent, surtout la gent féminine. Sa vie est finalement classique avec un cursus d’études universitaires, un voyage à Paris, en Italie et en Grèce. Jacob ne s’attache à personne. Il est inconsistant, insaisissable, tout comme semble être la vie aux yeux de Virginia Woolf. La disparition de Jacob est peinte avec la même absence de relief que son existence.

Rien n’est clairement dit dans ce roman, tout est suggéré discrètement. Les scènes de vies sont peintes par petites touches pastel, très souvent sur un fond triste et dénué de vrais sentiments.
Seules les scènes d’enfance sont touchantes et affectueuses.

 

Pour ma première découverte de l’œuvre de Virginia Woolf, j’ai été frappée par l’abondance des portraits féminins, tous fortement pessimistes à l’exception de celui, très beau, de la mère de Jacob.
La beauté et la virginité des femmes semblent être l’idée fixe de cette époque. Mais comme ces jeunes filles ont une instruction très limitée, une certaine stupidité va de pair avec les deux premières caractéristiques.

« La question, elle et ses pareilles l’ont réglé en la réduisant à une bagatelle, quoi, se laver les mains le soir avant de se coucher, le seul point étant de choisir entre l’eau froide et l’eau chaude ; cela tranché, la tête a vraiment toute latitude. Mais, il faut le dire, l’idée vint à Jacob, à mi-repas, de se demander si elle avait une tête. »

« Le problème est insoluble. Le corps est attelé à un cerveau. La beauté va de pair avec la stupidité. Elle était là à regarder le feu comme elle aurait regardé le moutardier cassé. »

 

Des portraits féroces :

« Vivant de champagne et d’épices depuis deux siècles au moins (quatre, même pour les femmes), la comtesse Lucy avait l’air bien nourrie. Un subtil odorat et un nez allongé toujours en quête de senteurs ; sa lèvre inférieure poussait en avant une étroite corniche rouge ; les yeux, petits ; des houppes blond roux en guise de sourcils ; et la mâchoire lourde. »

 

Virginia Woolf semble s’être exprimée à travers Julia Hedge. Sa rancœur est palpable lorsqu’elle évoque la condition des femmes, vouées par la société à être méprisées et jamais reconnues.

« Miss Julia Hedge, la féministe, attendait ses livres. Ils n’arrivaient pas. Elle trempa sa plume. Elle observa autour d’elle. Son regard fut attiré par les finales du nom de Macauly. Elle lut tous les noms sur le pourtour du dôme – les noms des grands hommes qui nous rappelle… « Et zut ! » dit Julia Hedge, « Eliot, Brontë, elles n’avaient pas leur place, là-dedans ? » Infortunée Julia ! qui trempait sa plume dans l’amertume et laissait dénoué ses lacets de chaussures. Quand ses livres arrivèrent, elle s’attela à ses travaux titanesques, non sans s’apercevoir par l’un des nerfs de sa sensibilité exacerbée avec quel sang-froid, quelle décontraction, quelle componction les lecteurs mâles s’attelaient aux leurs. Ce jeune homme, par exemple. A part recopier les vers, qu’avait-il à faire ? Elle, il lui fallait mettre le nez dans les statistiques. Il y a plus de femmes que d’hommes. Oui ; mais si on laisse les femmes travailler comme les hommes, c’en sera fait d’elles beaucoup plus vites. Elles s’éteindront. C’était là sa thèse. La mort, le fiel et une amère poussière étaient au bout de sa plume ; à mesure que l’après-midi s’avançait, le rouge avait pénétré ses pommettes et une flamme brillait dans son regard. »

 

Challenge

Challenge-CLASSIQUES.jpg

 

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25 octobre 2010 1 25 /10 /octobre /2010 16:00

CRONOS---Linda-Le.jpg 

Quatrième de couverture

Quatrième de couverture

A Zaroffcity, le pouvoir est détenu par deux absolutistes : le Grand Guide, intronisé après un coup

d’Etat, et son ministre de l’Intérieur, Karaci, surnommé la Hyène par des habitants qui vivent sous

le régime de la terreur. Alors que les exactions se multiplient, alors que les opportunistes se rangent sous la bannière des nouveaux dirigeants, s’élève une voix, celle d’Una, fille d’un ancien

astronome devenu sénile, qui a dû le sauver en acceptant d’épouser Karaci. Sœur d’un comédien

exilé, elle lui écrit en secret des lettres sur sa solitude de captive, exprimant son amertume, ses

indignations, ses rancœurs, mais aussi son amour pour son vieux père, pour un gamin des rues

venu, malgré les dangers, lui apporter une consolation, pour un insurgé, auteur de pamphlets

subversifs. Peu à peu, une métamorphose s’opère en elle : d’abord résignée, elle rejoint les opposants et se mue en conspiratrice au moment où elle apprend qu’elle va être mère. Fable politique, tragédie mettant en scène les excès d’une dictature, les compromissions des arrivistes, la corruption par l’argent et le musellement des rébellions, Cronos est aussi le chant d’amour d’une Antigone, résolue au sacrifice.

 

Avis d’une lectrice du dimanche

Coup de cœur pour cette fable terrifiante !

   

Une écriture ciselée pleine de finesse. Grâce à sa plume lumineuse, Linda Lê parvient à rendre lisible l’indicible, l’insupportable. Un langage très recherché coexiste harmonieusement avec des expressions d’un registre presque familier.

 

L’auteur dissèque les mécanismes qui permettent aux dictatures de s’installer. La somme de petites négligences et lâchetés permettent à des hommes politiques démagogues, sans scrupules, d’installer des régimes sanguinaires et cruels.

Souvent ces personnages ne sont pas pris au sérieux au départ. Leurs déclarations tonitruantes font sourire certains, tandis que leurs discours racistes et vindicatifs font grincer les dents des autres. Les populations sont hélas faciles à diriger, il suffit de manipuler et d’actionner des leviers efficaces tels que la division, les boucs émissaires.

 

Una a épousé le ministre de l’intérieur, Karaci, contrainte et forcée, uniquement pour sauver la vie à son père. Dans une correspondance clandestine et désespérée, elle livre son quotidien, ses états d’âme et surtout son cheminement intellectuel à son frère adoptif. Ce dernier a réussi à fuir Zaroffcity pour s’établir dans une contrée démocratique.

Una est une jeune femme à la personnalité à la fois exceptionnelle et ambiguë. Comme la plus grande partie de la population, elle plie d’abord devant la force brutale et pense avant tout à la survie de ceux qu’elle aime.

L'héroïne se raccroche à Marko, petit garçon des rues dont l'insolence et l'inconscience rappellent beaucoup le personnage de Gavroche dans Les misérables de Victor Hugo. Marko est un feu follet, incarnant légèreté et bohème !

 

Toutefois, personne ne peut résister longtemps à l'arbitraire. Les monstres s'attaquent aux opposants, puis aux plus faibles, jeunes filles, enfants... Ceux qui restent sagement dans le rang et même collaborent sont souvent rattrappés par la barbarie.

L'idéal citoyen de Una reprend peu à peu le dessus, sa révolte d’abord murmurée deviendra clameur ! Le courage n’est pas inné mais s’apprend, se cultive au quotidien.

 

Dans ce récit plein de noirceur, Linda Bê laisse une lueur d’espoir. Les tyrannies ne sont pas éternelles, des insurgés finissent toujours par briser ces régimes infernaux. Néanmoins, le prix à payer en vies humaines est lourd, extrêmement lourd…

 

Challenge
Rentree litteraire 2010-copie-1

  2ème titre / 7

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25 octobre 2010 1 25 /10 /octobre /2010 11:43

BLOG-PANNE.jpg 

 

Mon blog était en arrêt maladie
pour cause de bug...

 

Je n'ai pas trouvé la cause et les conseils éclairés d'Overblog se sont heurtés à l'incompréhension d'une calamité en informatique (oui, c'est moi...).

 

J'ai refait mon billet sur le livre de Linda Lê, Cronos. Pas de chance, je ne fais jamais de brouillons ni aucune sauvegarde ! Du coup, cet article est sans doute sensiblement différent du précédent.

 

Après avoir refait mon article disparu, les colones de droite son réapparues, youpi ! 

 

 

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24 octobre 2010 7 24 /10 /octobre /2010 00:05

Lauca - Nevado Parinacota - 6342m & lac chungara - 4517m

 

En 1999, lors du voyage en Bolivie, nous avons fait une escapade de quelques jours dans le nord du Chili.

Après une pause très rapide à San Pedro de Atacama (ville très prisée par les touristes américains et horriblement chère), puis nous avons roulé en bus jusqu'à Arica, pour finir d'arriver à Putre en taxi collectif. Ce village a été notre base pour visiter le magnifique parc national du Lauca.En plus des paysages grandioses, de nombreux animaux peuplent cette contrée : vigognes, vicachas, lamas, alpagas, oies des Andes, renard des Andes...

 

Lauca - 4

 

Lauca - 1

 

Lauca - eglise Parinacota-2

 

Lauca - eglise Parinacota-3

 

Lauca - eglise Parinacota

 

Lauca - Parinacota-1

 

Lauca - Lama voiture

 

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21 octobre 2010 4 21 /10 /octobre /2010 09:00

LOGO Les citations du jeudi 

 

« Un gros matou gris était accroupi sous le camion. Il avait une oreille déchirée et une balafre en biais sur le museau.
- Tu t’es battu ? La vie a été dure pour toi ? demanda le chauffeur. Il voulu s’approcher, la main tendue, mais le chat se mit à gronder, le poil hérissé et les oreilles aplaties. J’ai compris, dit-il, tu as soif mais tu n’aimes pas les familiarités… le matou but un deuxième bol de lait, s’essuya les moustaches puis s’en alla en roulant des épaules »

                                        Jacques Poulin (La tournée d'automne)

 

Vous retrouverez tous les participants
à la citation du jeudi sur le blog de Chiffonnette
 

 

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19 octobre 2010 2 19 /10 /octobre /2010 19:00

  echappee-belle ANNA GAVALDA

 

Quatrième de couverture

Simon, Garance et Lola, trois frères et sœurs devenus grands (vieux?), s’enfuient d’un mariage de famille qui s’annonce particulièrement éprouvant pour aller rejoindre Vincent, le petit dernier, devenu guide saisonnier d’un château perdu au fin fond de la campagne tourangelle.
Oubliant pour quelques heures marmaille, conjoint, divorce, soucis et mondanités, ils vont s’offrir une dernière vraie belle journée d’enfance volée à leur vie d’adultes.

 

Avis d'une lectrice du dimanche

Une lecture légère et agréable qui se déguste comme une gourmandise...

Je mentirais si je disais que ce roman restera gravé dans ma mémoire. Mais si l'histoire s'oublie rapidement, il n'en n'est pas de même des sensations délicieuses que procure ce récit.

Anna Gavalda maîtrise l'art de raconter une histoire simple en lui donnant une lumière particulière. Après avoir craqué pour Ensemble, c'est tout, j'avais été déçu par d'autres titres : Je l'aimais, La consolante. Ce tout petit livre m'a réconciliée avec cet auteur !

Que trouverez-vous dans ce livre ? Un optimisme tout azimut qui enlève un peu de crédibilité à l'histoire, de jeunes (et un peu moins jeunes) adultes aux personnalités attachantes mais ébauchées de manière un peu trop floues et schématiques...

Qu'est-ce qui fait le charme de ce livre ? Quel est le filtre secret qui m'a fait oublier toutes les petites faiblesses du récit ? Anna Gavalda nous offre un beau présent : un retour en enfance ! Fuguer, faire l'école buissonnière une dernière fois, qui n'a jamais rêvé de cette pause magique ? Garance, Simon et Lola laissent en plan leur famille, fuient une cérémonie ennuyeuse de mariage pour rejoindre leur plus jeune frère et s'offrir un moment entre eux, dans une bulle d'insouciance.

Les deux frangines font la vie dure à la femme qui a osé gagner le coeur de leur frère chéri. Simon, de son côté, se laisse bousculer et chouchouter par ses deux soeurs, tout en entretenant une complicité toute masculine avec Vincent. L'amour mais aussi les faiblesses et les erreurs de leurs parents les ont soudés. Les contraintes de la vie adulte fragilisent peu à peu les liens de cette fratrie idyllique. Ils en sont conscients et dérobent à l'arrachée les dernières parcelles de l'insouciance de leur enfance.

J'ai bu avec le sourire cette journée avec ces quatre frères et soeurs. Peut-être parce que j'adore ma soeur et je rêverais d'avoir eu un frère ou un soeur supplémentaires pour jouer, se crêper le chignon dans un groupe solidaire et unique.

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17 octobre 2010 7 17 /10 /octobre /2010 00:00

Sajama- 1

 

Le Sajama est le plus haut volcan de Bolivie, avec un sommet qui culmine à 6 542 m.

Lorsque j'ai visité ce site en 1999, ce parc national accueillait très peu de visiteurs car les infrastructures d'accueil étaient  inexistantes (d'ailleurs je ne suis pas vraiment sûre que cela ait changé...)

Nous avons été hébergés chez l'habitant (pas d'hôtel), dans un espèce de grange équipée de quelques lits. Ni électricité, ni chauffage, ni eau courante, ni sanitaires bien sûr. Dans ce type de voyage, il est indispensable de prévoir des lingettes pour assurer une hygiène minimale et ne pas avoir l'odeur de l'abominable homme des neiges.

Pas de restaurant non plus mais une petite cantine. Les villageois s'y restaurent souvent, la nourriture est très sommaire : une soupe insipide, du riz, de la viande une seule fois en quatre jours, et enfin du maté (boisson à base de feuilles de coca).

Les randonnées sur ce sites sont superbes : volcans enneigés, mini geysers... 

Sajama- eglise-1

 

Sajama- eglise-2

 

C'était l'anniversaire de ce parc national. Le responsable officiel avait invité la douzaine de touristes présents à assister à la cérémonie (mis à part notre groupe de 4, les autres étaient des alpinistes).

 

Cela a démarré avec un discours puis une chorégraphie du condor par l'homme muni d'un tambour. Cela s'est poursuivi par une course de vélo. Et enfin, cette fête s'est terminée par un rite particulier et inattendu : le sacrifice d'un lama et l'hommage à la Pacha Mama en versant le sang recueilli sur le sol.

Nous avons poliment décliné l'honneur de recevoir les viscères, ils ont finalement été offerts à quelques habitants enthousiastes...

Sajama- ceremonie anniversaire-1

 

Sajama- ceremonie anniversaire-2

 

Sajama- sacrifice lama

 

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14 octobre 2010 4 14 /10 /octobre /2010 18:38

LOGO Les citations du jeudi

 

Quand un livre ne lui plaisait pas, il le mettait au purgatoire, c'est-à-dire dans un cagibi, en attente avec d'autres volumes. Au fur et à mesure des besoins, il en arrachait les pages, les reliant avec une ficelle, afin qu'elles servissent au moins de papier hygiénique dans le cabanon d'aisance au fond du jardin.
- Aux chiottes, les dogmes et les doctrinaires ! Les verbeux, les pisse-froid, les peine-à-jouir, les baise-petit, les aigrefins ! Aux chiottes, te dis-je !"

                       Françoise Lefèvre (La grosse)


Vous retrouverez tous les participants
à la citation du jeudi sur le blog de Chiffonnette
 

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12 octobre 2010 2 12 /10 /octobre /2010 06:30

Laver-les-ombres---Jeanne-Benameur.jpg

 

Quatrième de couverture

Léa danse, jetée à corps perdu dans la perfection du mouvement. Elle est chorégraphe par nécessité. Léa aim, mais ne peut s'abandonner à Bruno, peintre de l'immobile. En pleine tempête, elle part vers l'océan retrouver sa mère, celle qui s'est toujours tue.
Alors ont lieu l'épreuve de la parole et celle de l'écoute. Jusqu'où une fille peut-elle entendre ? C'est ce péril fertile de la parole partagée qui est au coeur du roman.

Il conduira au corps d'une jeune fille de seize ans livré dans une maison close pendant la guerre, à Naples. Il conduira à l'énigme de l'amour qui consent et soumet. Il conduira au mystère de l'enfantement.

Par le jeu de onze tableaux dévoilant la vie des absents en contrepoint de la ligne narrative, dans une langue retenue et vibrante, Jeanne Benameur chorégraphie les secrets de la transmission et la fervente assomption des mots qui délivrent.

 

Avis d'une lectrice du dimanche

J'aimé ce beau livre sur le langage et l'amour entre une mère et sa fille.  

Que dire de plus que cette quatrième de couverture qui en raconte peut-être un peu trop ? Mais en même temps le mystère ne s'inscrit pas dans cette histoire.

Léa, a ressenti dans chaque parcelle de son corps, et depuis toujours, le secret qui enserre l'amour de sa mère, le poids qui pèse chaque jour sur sa parole. Ces non-dits et cette angoisse diffuse ont façonné tout son être. Pour survivre et trouver sa place dans le monde, supporter la lourdeur de ses pensée, elle vit en permanence dans le mouvement, elle danse :

"Elle est un mot étranger jeté dans une langue.Comme un mot tout seul jeté dans le silence. Elle se sent intruse. Depuis toute petite. Alors elle danse. Il faut qu'elle trace, avec son corps, les lignes qui permettent d'intégrer l'espace. Seule la beauté du mouvement peut le sauver. C'est sa façon de trouver place dans la vie. Léa est chorégraphe par nécessité.  

"Elle retrouve la sensation délicieuse de ne plus éprouver son poids sur terre. C'est ce qu'elle aime quand elle a bien dansé. Elle ne pèse plus rien. Un atome de poussière parmi d'autres, infiniment d'autres. Elle disparaît. Ca lui va." 

Léa est incapable d'exprimer des sentiments, sa respiration se libère avec parcimonie dans la gestuelle rigoureuse. Elle rejette un homme aux sentiments sincères.
Elle voudrait intégrer sa mère au centre de sa chorégraphie pour finir de grandir sous la douceur de son regard. Les jours de la mère sont comptés et elle se rend compte de la fragilité de Léa.

Lors d'une nuit de tempête, les deux femmes se rencontrent. Les vannes vont alors s'ouvrir pour révéler l'indicible à son enfant.

 

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7 octobre 2010 4 07 /10 /octobre /2010 13:00

LOGO Les citations du jeudi

 

"Il est dix heures.
Ô ma pauvre petite fille ! encore six heures, et je serai mort ! Je serai quelque chose d'immonde qui traînera sur la table froide des amphithéâtre  ; une tête qu'on moulera d'un côté, un tronc qu'on disséquera de l'autre; puis de ce qui restera, on en mettra plein une bière, et le tout ira à Clamart.
Voilà ce qu'ils vont faire de ton père, ces hommes dont aucun ne me hait, qui tous me plaignent et tous pourraient me sauver. Ils vont me tuer. Comprends-tu cela, Marie ? me tuer de sang-froid, en cérémonie, pour le bien de la chose ! Ah ! Grand Dieu !
Pauvre petite, ton père, qui t'aimait tant, ton père qui baisait ton petit cou blanc et parfumé, qui passait la main sans cesse dans les boucles de tes cheveux comme sur de la soie, qui prenait ton joli visage rond dans sa main, qui te faisait sauter sur ses genoux, et le soir joignait tes deux petites mains pour prier Dieu !!
Qui est-ce qui te fera tout cela maintenant ? Qui est-ce qui t'aimera ? Tous les enfants de ton âge auront des pères, excepté toi. Comment te déshabiteras-tu, mon enfant, du jour de l'an, des étrennes, des beaux joujoux, des bonbons et des baisers ? Comme te déshabitueras-tu, malheureuse orpheline, de boire et de manger ?
Oh ! si ces jurés l'avaient vue, au moins, ma jolie petite Marie, ils auraient compris qu'il ne faut pas tuer le père d'un enfant de trois ans."
                                                       Victor Hugo (Le dernier jour d'un condamné)

 

 

Vous retrouverez tous les participants
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