Quatrième de couverture
Ce matin, quand Méréana se réveille, elle sait que la journée qui l'attend ne sera pas comme les autres. Elles sont une quinzaine à casser des blocs de pierre dans une carrière au bord d'un fleuve africain. Elles viennent d'apprendre que la construction d'un aéroport a fait considérablement augmenter le prix du gravier, et elles ont décidé ensemble que le sac qu'elles cèdent aux intermédiaires coûterait désormais plus cher, et que Méréana serait leur porte-parole dans cette négociation. L'enjeu de ce qui devient rapidement une lutte n'est pas seulement l'argent et sa faculté de transformer les rêves en projets - recommencer des études, ouvrir un commerce, prendre soin de sa famille... Malgré des vies marquées par la pauvreté, la guerre, les violences sexuelles et domestiques, l'oppression au travail et dans la famille, les "casseuses de cailloux" découvrent la force collective et retrouvent l'espoir. Cette journée ne sera pas comme les autres, c'est sûr, et les suivantes pourraient bien bouleverser leur existence à toutes, à défaut de changer le monde. Par sa description décapante des rapports de pouvoir dans une Afrique contemporaine dénuée de tout exotisme, Photo de groupe au bord du fleuve s'inscrit dans la plus belle tradition du roman social et humaniste, l'humour en plus.
Avis d’une lectrice du dimanche
Coup de cœur !
Des femmes congolaises cassent des pierres au bord d’un fleuve. Leur sueur produit le gravier nécessaire pour les grands chantiers de constructions. Leurs sacs de cailloux sont achetés par les négociants à un prix de misère alors que pendant ce temps, entrepreneurs et intermédiaires s’enrichissent de manière indécente. Un jour, ces casseuses de cailloux décident de se révolter pour obtenir un salaire qui leur permette de nourrir et éduquer décemment leur famille. Leur mouvement se structure et évolue de manière sensible, intelligente, pacifiste.
Les portraits de ces femmes déterminées sont exceptionnels, attachants !
Emmanuel Dongala ébauche une peinture terrible de l’Afrique en dénonçant tout ce qui la meurtrit : la violence des militaires, la dictature, la corruption, le sida, les femmes écrasées par le machisme et la tradition. Méréana, porte-voix du mouvement, répète à l'envie que les lois en faveur des femmes sont seulement des bouts de papiers destinés à faire plaisir à l’ONU. Dans la réalité, elles n’ont aucun droit. Leur unique chance de s’en sortir est d’accéder à tout prix à l’éducation.
Méréana écoute systématiquement les informations à la radio le matin, chez elle, en vaquant à ses occupations. Ces journaux créent des apartés intéressantes en instruisant brièvement le lecteur des faits divers, politiques et sociaux qui rythment le quotidien des populations. En filigrane, sans jamais alourdir le récit, l’auteur glisse en leitmotiv les difficultés de tout un continent.
Emmanuel Dongala écrit ce roman féministe d’une très belle manière. Son écriture est vigoureuse ! Il raconte la vie et la lutte de ces femmes en s’adressant à Méréana à la deuxième personne du singulier. Il interpelle son héroïne avec respect et humour aussi. Ce procédé plutôt original donne souffle et puissance à ce récit, à la fois dur et optimiste. L’auteur ne sombre pas dans le mélodrame, un sourire flotte toujours au détour des mots…