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19 mai 2009 2 19 /05 /mai /2009 20:59

Quatrième de couverture

 La nuit du 31 décembre, Gary et les autres membres de l'atelier de recherche mécanique de Mondial Laser, une entreprise de pointe vendue à l'Inde par un fonds spéculatif américain, prennent possession d'un navire de luxe, le Nausicaa. A bord, les actionnaires du fonds et leurs invités célèbrent au champagne une année de bénéfices records. Tandis que la fête bat son plein - bal masqué, orchestre, caviar - le Nausicaa est détourné. Il met cap au nord, vers la mer de Norvège, le Spitzberg, à la quête des grandes tempêtes d'hiver. Gary, Suz, Dargone, Doc, Amos, Maximilienne dite Maxi, Kiki, Isabelle, Jacqueline, Moïra... et cent autres de Mondial Laser veulent contraindre ceux pour qui ils n'étaient que des chiffres à connaître eux aussi le froid, les vagues en furie, la solitude, l'abandon... Dès lors, tout s'inverse. Ceux qui étaient condamnés à l'incertitude, à la précarité, à l'angoisse du lendemain, deviennent seuls maîtres à bord. La peur change de côté...


Avis d’une lectrice du dimanche 

Ce roman m’a touchée car il met en scène les drames que vivent en ce moment des millions de personnes. Des êtres humains perdent actuellement leur emploi, voient leur vie sombrer juste pour alourdir un peu plus l’escarcelle de riches actionnaires. Gérard Mordillat nous décrit ces rentiers, véritables parasites du milieu financier, qui considèrent les salariés uniquement comme des statistiques, des numéros à dégraisser pour accroître les profits. D’autres individus se retrouvent à la rue tout simplement car ils ont résisté, ont dit non à du harcèlement, non à des abus et des humiliations. Il y a aussi les suicides des plus fragiles…

J’ai aimé également ce livre car l’auteur réalise le rêve secret de nombreux salariés : les victimes se révoltent et contraignent ces riches patrons à un face à face pénible avec leur conscience lorsqu’ils en ont une, et au moins à une rencontre avec la peur de l’avenir.

Et enfin j’ai apprécié ce roman car ce n’est pas une analyse facile et démagogique. Après l’excitation de la révolte, nous revenons brutalement à la réalité. Les révolutions ne sont jamais totalement propres et font toujours couler le sang. Pour reprendre une citation de Daniel Balavoine, « il ne suffit pas d’être pauvre pour être honnête ». Ces mouvements de révolte comptent leurs héros mais aussi leurs traîtres et profiteurs. Nous sommes donc amenés à réfléchir à d’autres voies de lutte, de combats plus pacifiques et efficaces malgré tout…



Biographie de l'auteur
Gérard Mordillat est écrivain et cinéaste. Il a publié, entre autres, Les Vivants et les Morts, A quoi pense Walter ?, L'Attraction universelle, Béthanie, Vichy-Menthe, Mme Gore, Rue des Rigoles et Comment calmer M. Bracke. Il a réalisé Vive la sociale !, En compagnie d'Antonin Artaud, Corpus Christi, L'Origine du christianisme...

Il revendique dans toutes ses réalisations une coloration socio-politique, et donne la parole aux exclus.

Un article lui est consacré dans rue89 : « Gérard Mordillat : On organise la ruine du service public »

 


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18 mai 2009 1 18 /05 /mai /2009 20:56

Quatrième de couverture :
Pour son 4 heures, Salomon avait droit à un paquet de BN entier, Abdou goûtait deux tartines bourrées de Nutella et moi je les regardais manger.

Mabrouck Rachedi est l'auteur du Poids d'une âme. Il a travaillé dans la finance et vit en banlieue parisienne. Avec ce second roman, il pose un regard tendre et espiègle sur la jeunesse épique d'une bande de copains aux destins contrastés.

Avis d'une lectrice du dimanche :
J'ai découvert ce roman grâce à Fanyoun !
J'ai beaucoup aimé l'écriture légère de Mabrouck Rachedi et sa vision pleine de sensibilité sur la jeunesse.
Malik grandit dans une cité de la banlieue parisienne, élevé par une mère aimante mais tellement seule ! Toutes les étapes de l'enfance puis de l'adolescence sont évoquées : les espiègleries envers le marchand de glace, l'école, les bagarres, le foot, l'appartenance à des bandes, les filles... Puis les premières désillusions marquent le passage de l'adolescence à l'âge adulte avec l'injustice du milieu professionnel, la difficulté à trouver ses marques. Par manque de repères, Malik oscille entre insertion et rupture avec la société. Avec ses deux meilleurs copains, ils forment d'abord un trio inséparable, multi-culturel :
"C'était à une époque où Salomon le feuj, Abdou le black et moi, Malik le beur, cohabitions dans la paix et le respect. Malgré nos différences."
Ces trois mousquetaires empruntent par la suite des chemins de vie diférents. Salomon choisit de se sortir du ghetto alors qu'Abdel sombre dans la drogue...
L'histoire de ces trois jeunes gens pourrait être celle de nombreux adolesents. Tous les jeunes vivent un jour cette déchirure avec l'enfance et se heurtent à la difficulté de dessiner leur avenir sur une page blanche, effrayante. Un peu d'amertume s'ajoute à ces portraits à cause de la difficulté à vivre dans les banlieues. Le poids des préjugés et les barrières dressées pour s'insérer hors de la cité sont autant de boulets à traîner pour ces jeunes.
Mabrouck Rachedi jette un regard inhabituel et juste sur les banlieues. Il sort des stéréotypes habituels, ne sombre ni dans la violence complaisante ni dans un optimisme naïf.

"10 ans

Je regardais tranquille Les lascars à la télé. Maman m’avait préparé des beignets aux pommes, mes préférés. Les devoirs m’attendaient à mon bureau vers lequel, résigné, je me suis dirigé. J’aimais perdre quelques minutes à faire tourner la mappemonde où mon doigt pointait le lieu d’un voyage imaginaire. Mon atlas était le guide du routard de mes divagations. Cette fois-ci, je suis allé en Belgique où j’ai traversé les rigueurs de l’hiver, chevauché la frontière entre les Flandres et la Wallonie, descendu Ice Mountain, la piste de ski couverte de Comines, visité le musée de la Rubanerie, découvert émerveillé la fameuse médiathèque de Mouscron, arpenté les tranchées de la Première Guerre mondiale puis les zones minières en friche… Retour à la réalité, je bouclais mon exercice de maths en dix minutes et révisais un poème amusant à propos d’un inventaire. Ma mère a corrigé une retenue oubliée dans une multiplication et m’a conseillé de réciter moins vite la prochaine fois. J’avais bien travaillé, demain le maître et la classe me féliciteraient. Maman m’a donné une permission de sortie d’une heure et demie, le temps d’un foot avec les copains. Sur le chemin, j’ai aidé Mme Cohen qui traînait deux sacs aussi lourds que des parpaings. Aux passages piétons, les automobilistes s’arrêtaient avec le sourire et un salut amical. Sur son perron, Mme Cohen m’a glissé une piécette malgré mes protestations de pure forme. Mon pécule m’a permis d’acheter une canette de Coca chez Mouloud l’épicier tellement bigleux qu’il ne reconnaissait pas le voleur qu’il vouait aux gémonies. Au terrain de foot, on a tapoté dans le ballon sans s’insulter, juste par amour du beau geste. Les passes succédaient aux mouvements collectifs qui précédaient des buts d’anthologie dans un match où la rigueur de notre stratégie ne tuait pas les élans créatifs, où les bourrins ne taclaient pas tout ce qui bougeait et où la partie se terminait par une accolade entre adversaire fair-play. On a déroulé le film de la rencontre sous la douche qui crachait des jets d’eau chaude puis on est rentrés chez nous. Là, surprise, maman avait préparé des crêpes pour Mardi gras. J’en ai englouti une dizaine, enrobées de chocolat onctueux. Maman m’a ensuite indiqué la porte pour une sortie cinéma. Fallait que je me cultive en m’ouvrant à d’autres univers que des émissions de télé débiles m’a-t-elle dit et elle avait raison, le film m’a remué. Au retour, on a flâné le long d’un trottoir en humant l’air du temps. Des policiers nous ont salués d’une inclinaison de tête, qu’on leur a rendue, puis on a commandé une glace et on s’en est allés. Maman m’a raconté l’histoire de papa, parti en mission quelque temps mais qui reviendrait, promis. Et Boualem ? Un moment d’égarement, une passade, rien de plus. Sa voix me berçait quand je m’enfonçais sur le siège en cuir de notre break.

 Je me suis réveillé.

Maman gueulait qu’il fallait que j’aille aux courses.

En fond sonore, une émission de jeu.

Je n’avais ni ordinateur ni mappemonde.

Et je n’avais pas fait mes devoirs."

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6 mai 2009 3 06 /05 /mai /2009 15:35

Dans ce livre, Daniel Pennac nous livre ses souvenirs d'école, pour le moins pénibles. Un cancre, mais oui, vous avez bien entendu, cet enseignant et auteur de talent avoue un passé de cancre !
Ce roman autobiographique est un vrai régal, malgré quelques longueurs.
Daniel Pennac nous entraîne dans la longue galère de l'élève décrié par les enseignants. Passer du cancre au délinquant, la frontière est mince ! Le regard des autres élèves et de la famille est tellement pesant qu'il faut trouver un moyen pour attirer l'attention et se valoriser : les bandes, la rébellion...
Qu'est-ce qui produit le déclic pour sortir de cette spirale de l'échec ? La rencontre d'enseignants passionnés, qui ne jugent pas, ne laissent pas tomber les élèves. Des enseignants qui, l'air de rien, sauront piquer la curiosité des plus récalcitrants...
Maintenant Daniel Pennac est passé de l'autre côté, celui de ceux qui ont appris et ont "réussi". Il essaie de poser des diagnostics sur l'échec scolaire et propose des solutions. Son approche de l'éducation emportera votre adhésion ou pas, peu importe. L'essentiel est de savoir que tout n'est pas joué à 3 ans, comme l'affirment certains psychologues. Une évolution intellectuelle satisfaisante est toujours possible, même à un âge tardif !


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2 mai 2009 6 02 /05 /mai /2009 08:59
J'ai découvert ce livre en voyageant sur les blogs de lecture, en quête de nouveautés, de présentations lyriques qui donnent envie de plonger dans les lignes d'un roman...

Sur le site de Kimcat, j'ai craqué sur la couverture du premier roman de Béatrice Riot, Lisabelle. Fan de chats, je n'ai pas résisté au joli minois de la photo ! Un félin magnifique que l'on a envie d'adopter.

J'ai passé un bon moment de lecture avec ce roman plein de tendresse.
L'amitié indéfectible de son chat Caramel et Magalie va sauver la vie de Lisabelle, rédactrice dans un journal animalier. L'auteur dépeint avec de délicates nuances les liens familiaux, affectueux ou destructeurs suivant les cas, mais dans tous les cas essentiels et déterminants pour l'équilibre de notre existence.

Avis aux amoureux de chats : ce roman est truffé de détails sympas et de références littéraires sur nos félins de compagnie !

Quatrième de couverture :
Lisabelle est la combinaison de deux prénoms. Un mélange exquis. Avant ma naissance, mes parents n'étaient pas tout à fait du même avis.
- Ce sera Lise, disait Papa en dégustant un nougat dont il raffolait.
- Ce sera Isabelle, ripostait Maman qui détestait les nougats.
- Lisabelle, répondis-je de l'intérieur.

Lisabelle était fin prête pour s'intégrer à un monde peuplé de livres et de chats.
Rédactrice de la rubrique "Le Chef-d'Oeuvre des Félins" dans une revue animalière, elle reçoit sur son ordinateur d'étranges messages qui ressemblent à des menaces. Elle ne sait pas encore en ce mois de décembre 2006, à presque cinquante ans, qu'un homme plein de rancoeur sous l'emprise d'un amour dévastateur peut ouvrir la porte qui le conduit au crime... Heureusement pour Lisabelle, Magalie, son amie virtuelle, et surtout Caramel, son beau chat roux, veillent au grain.
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26 avril 2009 7 26 /04 /avril /2009 16:52


Quatrième de couverture :
C'est un vieil homme debout à l'arrière d'un bateau. Il serre dans ses bras une valise légère et un nouveau-né, plus léger encore que la valise. Le vieil homme se nomme Monsieur Linh. Il est le seul désormais à savoir qu'il s'appelle ainsi. Debout à la poupe du bateau, il voit s'éloigner son pays, celui de ces ancêtres et de ses morts, tandis que dans ses bras l'enfant dort. Le pays s'éloigne, devient infiniment petit, et Monsieur Linh le regarde disparaître à l'horizon, pendant des heures, malgré le vent qui souffle et le chahute comme une marionnette.

 

Avis d’une lectrice du dimanche :

Un beau moment de lecture. L’écriture de Philippe Claudel est sobre et pudique. Avec un infini respect pour ses personnages, il adoucit leur quotidien grâce à l’amitié, la tolérance et la compassion.

Un vieillard, Monsieur Linh, fuit son pays ravagé par la guerre. Avec d’autres réfugiés, il arrive dans un pays sans aucune saveur pour lui. Il a tout perdu, sa seule raison de s’accrocher est le nouveau-né qu’il serre dans ses bras : sa petite-fille, l’unique survivante de sa famille. Monsieur Linh vit dans ses souvenirs et ses chimères aussi… Dans cette grande ville anonyme, une amitié inattendue va réchauffer son cœur. Monsieur Bark et lui ne parlent pas la même langue mais ils comprennent leur solitude commune, la perte des êtres chers.

 

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26 avril 2009 7 26 /04 /avril /2009 16:02

Quatrième de couverture :
C'est l'histoire d'une couturière qui aimait trop la photographie et c'est l'histoire de ses photographies. C'est l'histoire d'un jardinier qui aimait trop les femmes et c'est l'histoire de son jardin. C'est l'histoire du zouave qui chantait et celle de Sarah qui abandonne son tambourin. C'est l'histoire du prêtre défroqué, amoureux de Sarah. C'est l'histoire de Muriel, l'enfant inachevée. Il y a aussi deux miliciens interlopes, une contrebandière scandaleuse et son mari boucher. Il y a aussi un lieutenant allemand, des aviateurs dans les déserts, des architectes dans les jardins. Et il y a Lou. Lou au centre du monde et qui réunifie le monde.
Enfin, il y a cet homme qui se souvient sans avoir rien connu, qui les interroge tous et cherche une réponse. Dans Les jardins publics, l'univers de Gille Leroy atteint l'ampleur d'une fresque contemporaine.

 

Avis d’une lectrice du dimanche :

Je n’ai ni aimé ni compris ce roman... Je l'ai terminé péniblement, avec un sentiment d’incrédulité et d’ennui.

Les personnages sont flous. A l'exception de Lou et Sarah, leurs prénoms s'effacent au profit de désignations : l'homme aux souvenirs, le jardinier, la voleuse, la couturière... Les contours des individus sont tellement vagues qu'ils sont semblables à des fantômes errant doucement dans le texte. Seule Valentine a une vraie consistance et on s'en passerai bien : mère violente, elle confond sa fille avec une poupée de chiffons et la fait poser à l'infini pour assouvir sa folie de photographie. Meme le contexte de la guerre, plein de violence, d'antisémitisme, de peur et de privations, est parfois atténué à force de diluer les pastels de la description.

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19 avril 2009 7 19 /04 /avril /2009 21:42

L'idée de base est attrayante : un roman épistolaire. Original pour des écrits du XXIème siècle !
Kay Bartholdi, libraire à Fécamp, engage des échanges de lettres avec un client inconnu, aux goûts littéraires qui la séduisent.

Toutefois, l'histoire ne m'a pas du tout convaincue, la trame est artificielle et sans surprise.
Ce qui m'a le plus gênée est la tendance moralisatrice. L'héroïne dégouline de gentillesse, de moralité, d'élitisme littéraire. Par exemple, l'héroïne évoque avec hauteur sa vendeuse, qu'elle "aime" beaucoup :
"Qu'a-t-elle bien pu vous raconter ? Elle ne sait pas grand-chose de ma vie. elle ne lit que des romans policiers. Quand je lui prête un livre que j'aime, elle essaie de le lire, mais m'avoue que c'est trop compliqué, qu'il n'y a pas de vraie histoire, pas de suspense ! Et je le retrouve coincé entre le sucre et la farine !"

Quatrième de couverture :
Kay Bartholdi est libraire à Fécamp, Jonathan Shields est un écrivain américain. Pour un guide touristique de la côte normande, il lui commande des livres par correspondance. Elle répond à cet inconnu qui semble partager les mêmes goûts qu'elle. Lettre après lettre, ils se découvrent une même passion pour la littérature. Cette relation épistolaire devient bientôt aussi passionnée que celle de deux amoureux. Ils se découvrent, se jaugent, s'offrent l'un l'autre leurs plus belles lectures : Maupassant, Jean Lorrain, Flaubert, Barbey d'Aurevilly, Roger Martin du Gard, etc... et se disent, à travers leurs auteurs préférés, des choses qu'ils n'auraient pas osé avouer.

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17 avril 2009 5 17 /04 /avril /2009 21:16

Ce roman m'a presque autant bouleversée que L'élégance du Hérisson.

Le héro central est un célèbre critique culinaire. Le décor est planté dès le début du livre :
"Je vais mourir et je ne parviens pas à me rappeler une saveur qui me trotte dans le coeur. je sais que cette saveur là, c'est la vérité ultime de toute ma vie, qu'elle détient la clef d'un coeur que j'ai fait taire depuis".

C'est le plus grand critique de la gastronomie, c'est aussi un sale type : il a évincé ses concurrents comme de vulgaires moucherons, les humiliant au passage. Il a rabaissé un grand nombre de cuisiniers. Il a négligé et méprisé son épouse qu'il considère uniquement comme un joli bibelot. Ses enfants ont été anéantis par son écrasante personnalité et par l'absence d'amour, de considération.

 Les membres de sa famille le haïssent d'autant plus fort qu'ils n'ont pas réussi à chasser une dernière étincelle d'amour qui achève de pourrir leur existence.
Un long monologue de son fils est édifiant ! En voici quelques passages :

"Vieille outre purulente. Charogne putride. Crève, mais crève donc. Crève dans tes draps de soie, dans ta chambre de pacha, dans ta cage de bourgeois, crève, crève, crève. Au moins, on aura ton fric, à défaut d'avoir eu ta faveur. Tout ton fric de ponte de la bouffe, qui ne te sert plus à rien, qui ira à d'autres, ton fric de propriétaire, le fric de ta corruption, de tes activités de parasite, toute cette bouffe, tout ce luxe, ah quel gaspillage... Crève..."
...
"Mais si père, tu en as fait quelque chose de tes marmots, ils ne sont rien d'autre que ton oeuvre, tu les as hachés menu, débités, noyés dans une mauvaise sauce et voilà ce qu'ils sont devenus : de la boue, des ratés, des faibles, des minables."
...
"Il y a pourtant bien plus important, je vais mourir bientôt moi aussi, je m'en fous parce que, en ce moment, il est en train de crever et que je l'aime ce salaud, je l'aime, oh merde..."


Moi non plus, je n'ai pas réussi à haïr totalement ce personnage. Il aime trop la cuisine et les mots. Les descriptions sont magnifiques, fines et rustres à la fois.

"Les boulettes de viande hachées, grillées dans le respect de leur fermeté et qui cependant ne gardaient de leur passage au feu aucune trace de sécheresse, remplissaient ma bouche de carnassier professionnel d'une onde chaude, épicée, juteuse et compacte de plaisir masticatoire. Les poivrons sucrés, onctueux et frais attendrissaient mes papilles subjuguées par la rigueur virile de la viande et les préparaient de nouveau à cet assaut puissant."

"J'ai connu l'un de mes plus beaux repas. La chère était simple et délicieuse mais ce que j'ai dévoré ainsi, jusqu'à reléguer huîtres, jambon, asperges et poularde au rand d'accessoires secondaires, c'est la truculence de leur parler, brutal en sa syntaxe débraillée mais chaleureux en son authenticité juvénile. Je me suis régalé de mots, oui, des mots jaillissant de leur réunion de frères campagnards, de ces mots qui, parfois, l'emportent en délectation sur les choses de la chair..."


Bref, il est difficile de ne pas admirer ce monstre. Odorat et papilles en éveil, j'ai suivi pas à pas la recherche de cet homme de la saveur ultime...


Quatrième de couverture :
C'est le plus grand critique culinaire du monde, le Pape de la gastronomie, le Messie des agapes somptueuses. Demain, il va mourir. Il le sait et il n'en a cure : aux portes de la mort, il est en quête d'une saveur qui lui trotte dans le cœur, une saveur d'enfance ou d'adolescence, un mets original et merveilleux dont il pressent qu'il vaut bien plus que tous ses festins de gourmet accompli. Alors il se souvient. Silencieusement, parfois frénétiquement, il vogue au gré des méandres de sa mémoire gustative, il plonge dans les cocottes de son enfance, il en arpente les plages et les potagers, entre campagne et parfums, odeurs et saveurs, fragrances, fumets, gibiers, viandes, poissons et premiers alcools... Il se souvient et il ne trouve pas. Pas encore.
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14 avril 2009 2 14 /04 /avril /2009 21:24

La dernière lecture lors de mes vacances d'avril...
Roman plutôt sympa, même si j'ai largement préféré "Ensemble et c'est tout" et "Je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part."

On se sent proche des personnages, tellement humains. Une triste et banale histoire démarre avec une jeune femme abandonnée par son mari pour une maîtresse plus jeune. Seule avec ses deux enfants, elle déprime et s'effondre. Son beau-père est un père et un mari dur, distant. Contre toute attente, il fait preuve de compassion pour Chloé et la choie comme sa propre fille. Il ne s'apitoie pas sur elle, lui parle des vicissitudes de l'amour et même se confesse : autrefois follement épris d'une maîtresse, il s'est raccroché par lâcheté à son mariage, devenant aigri et peu à peu infernal avec son entourage. Son fils a brisé les tabous, a déchiré son cocon familial et a en même temps donné la chance à Chloé de décider de sa propre vie et ne pas bannir le bonheur à jamais. En accord ou non avec cette conception des choses, on s'attache à Chloé et à son beau-père, à cette complicité improbable.

Quatrième de couverture :
Parce que sa belle-fille est malheureuse, Pierre Dieppel, soixante-cinq ans, l'emmène à la campagne. Parce qu'elle ne se nourrit plus, il décide de faire la cuisine. Parce qu'elle n'arrête pas de pleurer, il va chercher du bon vin à la cave. Il s'assoit à côté d'elle et pour la première fois, il parle. De lui. De sa vie. Ou plutôt de ce qu'il n'a pas vécu.
Cette histoire est donc la confession d'un homme dans une cuisine. Ca n'a l'air de rien et pourtant, comme toujours avec Gavalda, tout est là. Nos doutes, notre ironie et notre tendresse, le tapage de nos souvenirs et "la vie comme elle va"...
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13 avril 2009 1 13 /04 /avril /2009 00:12

J'ai profité de cette semaine de vacances pour faire une orgie de lecture ! Quelques livres ont réussi à se glisser entre les balades et les siestes...

Ce roman fait vraiment partie de mes livres préférés.

Ann Hidden, le personnage principal, est difficile à suivre, à comprendre et semble parfois perdue dans un monde isolé, une tour d'ivoire. Cette femme, une artiste reconnue, fuit en permanence, change de vie avec la facilité d'un caméléon.
 En fait, j'ai surtout été touchée par l'écriture de Quignard, épuré et sobre, pourtant si riche en émotions. J'ai aimé sa manière de parler de la musique et du processus de création artistique. j'ai adoré sa description de la villa Amalia, un vrai sanctuaire, hâvre de beauté. Mais ce livre m'a aussi tordu le coeur car Quignard sait également décrire l'enfer, la précarité de l'instant heureux, trop fugace...

Quelques extraits :

"En une minute le soleil crevait la surface de la mer et tout était éclaboussé de lumière. Le lieu était peu à peu gagné par la profondeur. La distrance provenait d'abord des sons qui naissaient partout. Tout apparaissait aux premiers instants dans une espèce de substance crémeuse mêlée peu à peu de violet et de noir.
Puis de vert autour des arbres et sur les flancs de la colline.
Alors les ombres surgissaient autour des formes. Elles mettaient en relief les maisons et les animaux."

"Tous les amants ont peur. Elle avait terriblement peur de ne pas convenir à la maison. Elle eut peur de ne pas savoir s'y prendre en lançant les travaux. Peur d'en altérer la force. Peur de rompre un équilibre. Peur aussi d'être déçue. Peur de ne pas être aussi heureuse qu'elle pensait qu'elle allait l'être quand elle avait découvert la villa pour la première fois.
Le printemps balaya la peur.
Ce furent les grands jasmins sauvages.
Ce furent les buissons de roses.
Ce furent les anémones sans nombre, aux couleurs si profondes, aux beautés de soie.
Ce furent les pavots.
Elle avait aimé nager dans la mer froide qui lui rappelait la Bretagne.
Elle aima s'épuiser dans une mer devenue plus chaude et plus ombrageuse avec le printemps."
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